La Pie-grièche écorcheur est un
passereau migrateur qui nous revient d’Afrique dans les deux premières décades
de mai. Cette espèce fait figure de petit rapace avec la mandibule supérieure recourbée de son
bec. Son nom d’écorcheur provient de l'habitude de certains individus qui empalent une partie de
leurs proies sur des épines de prunelliers ou des barbelés qui deviennent des
garde-mangers. Notre pie-grièche a besoin de prairies pâturées ou de fauches,
de bandes herbeuses et de postes de guet comme des piquets pour chasser et des
haies, des buissons de ronces pour y nicher.
L’agriculture intensive, avec ses
pesticides et ses nouvelles pratiques, a porté un coup fatal aux effectifs à
partir des années 50. Les populations ont régressé en Europe
occidentale mais c’est en Angleterre que la régression a été spectaculaire. Un
effondrement de 50% entre les années 50
et 60, 253 couples en 1960, 81 en 1971, 1 en 1987. En France la baisse des
populations n’a pas été aussi catastrophique mais ce passereau a disparu des
zones de cultures trop intensives. En Loire-Atlantique les populations sont
surtout nord-Loire. Ce sont les prairies
ligériennes en aval de Nantes qui concentrent la population du 44. Le vignoble
n’attire pas la Pie-grièche écorcheur. Sur le secteur prospecté par notre
groupe, un seul point est connu pour accueillir chaque année un ou deux couples
et il se trouve dans le Maine et Loire et en bordure du fleuve (nous rappelons
que notre groupe est à cheval sur les deux départements).
Toutes les observations de Pie-grièche écorcheur dans la base de données jusqu'à 2016 |
En 2015, pendant la prospection
d’un carré rapace entre Ligné et Mouzeil (Loire-Atlantique), nous avons
découvert 6 couples sur 3 secteurs. Pour notre programme des sorties grand
public 2016, nous avons décidé d’organiser une sortie sur ces secteurs et de
tenter de retrouver ces Pies-grièches écorcheurs sachant que 90% des mâles
reviennent nicher dans un rayon inférieur à 1km autour du nid de l’année
précédente. Un autre but était de faire découvrir cette espèce dans un milieu
assez banal avec le cortège d’oiseaux qui fréquente les mêmes biotopes.
Nous sommes onze au rendez-vous
de Ligné pour une prospection Pie-grièche écorcheur sur les secteurs de 2015. La
météo n’est pas de la partie et les participants se regroupent sous le hayon du
monospace pour écouter quelques données
sur cette pie-grièche. Nous nous divisons en deux groupes car seulement deux animateurs sont présents pour
encadrer cette sortie. Le premier groupe part pour le haut du carré sur un secteur
très propice et le deuxième commence par le bas sur des secteurs en apparence
moins riches, nous nous croiserons au milieu de la sortie.
Après deux points de prospection,
notre deuxième groupe n’a toujours pas aperçu de pie-grièche et les averses se
succèdent. Nous nous contentons de Tariers pâtres, de Bruants jaunes et zizi,
de Linottes mélodieuses.
La magie du portable nous apprend
que le premier groupe a dénombré 3 mâles sur leur premier site de 2015. Nous
remontons les remplacer, au passage je constate que d’un des secteurs à bien
changer, les prairies sont remplacées par des cultures de fèveroles peu
propices à nos oiseaux, vu l’heure je préfère emmener le groupe voir l’objet de
cette sortie.
Sur place, un mâle est vite
repéré se déplaçant sur des piquets de clôture. Les prairies ont été fauchées
et il descend au sol capturer ses proies constituées d’insectes. Un Hypolaïs
polyglotte alerte dans un buisson et apparaît avec le bec garni de proies. Nous
éloignons pour découvrir un autre mâle d’écorcheur. Les oiseaux reviennent vers
nous pour disparaître dans la haie qui borde le chemin de terre. Les femelles
restent sur les nids pendant une quinzaine de jours après l’éclosion. Femelles
et jeunes ne sont pas encore visibles, la date de la sortie est sans doute trop
précoce d’une semaine.
Nous descendons le chemin et au
loin un troisième mâle est perché sur un buisson et reste à l’écart des deux
autres mâles.
Un grand oiseau gris survole une
prairie fauchée: Busard cendré mâle adulte! Dépêchons nous de l’admirer,
l’observation sera sans doute courte. Quelques minutes après il disparaît
derrière une haie mais tout le monde a eu le temps de l’identifier. Un mâle à
cette époque est nicheur mais il peut naviguer jusqu’à 10km de son nid, autant
chercher une aiguille dans une botte de foin. Nous terminons avec un sublime
Bruant jaune mâle et nous remballons avec la pluie.
Le résultat est mitigé puisque
nous n’avons retrouvé qu’un secteur avec des Pies-grièches écorcheurs mais les
participants sont tout de même contents, le Busard cendré était la cerise sur
le gâteau.
Jean-Luc Le Boucher